vieillir
lundi 3 avril,
20h : Film
L'Echappée belle (USA, 122 min.) de Paolo Virzi, avec
présentation et débat en présence de
Louis Mathieu et de Agnès Bourdain, de l'Association pour le
Droit de Mourir dans la Dignité
Cinéma Les 400 coups, 12, rue Claveau, Angers
Tarifs habituels aux
400 Coups : 8,60 €, réduit 6,90 €, carnets 5,70 € ou 5 €, moins de 26 ans 6 €, moins de 14 ans 4,50 € - tarif groupe, les matins également, sur réservation (02 41 88 70 95) : 4,20 €
jeudi
6 avril, 18h30 : Conférence
La vieillesse ou la dernière
chevauchée, par Geoffrey Ratouis, historien
Dans les contes et légendes, "le vieux", "la vieille",
recouvrent deux stéréotypes parfaitement opposés : la figure de sagesse et
de bonté de la marraine de Cendrillon s'oppose à celle, cruelle et sans pitié,
de la sorcière d'Hansel et Gretel. Pour autant, la vieillesse et sa finalité
qu'est la mort, sont également le sujet d'œuvres, souvent originales, de la
comédie au drame, de Cocoon de Ron Howard à Amour de Michael Haneke. Et si la vieillesse était aussi une aventure ?
Institut Municipal, place Saint-Eloi, Angers
Gratuit
mercredi 12
avril, 20h30 : Conférence
Vieillir dans la dignité, par
le Professeur Gilles Berrut, gérontologue, chef du Pôle
Hospitalo-universitaire de Gérontologie Clinique du CHU de Nantes
Vieillir dans la dignité est une forte demande des personnes âgées, et une interrogation pour ceux qui avancent en âge. Vouloir vivre dignement semble être une évidence, mais lorsque l'on se sent fragile, vulnérable, lorsque l'on ne correspond plus aux critères de performance de la société, ce qui était l'évidence, devient un défi. Comment construire les conditions d'une vie digne pour les personnes âgées, comment les freins que nous érigeons en société peuvent être combattus pour construire les conditions d'une vie digne pour les personnes âgées quelque soient leur vulnérabilité.
Institut Municipal, place Saint-Eloi, Angers
Gratuit
jeudi 13 avril,18h30 : Film documentaire
Flore, de Jean-Albert Lièvre (France, 2014), avec débat avec le Dr Bruno Martin, gériâtre, et des bénévoles de France Alzheimer 49
Une ode à la vie. Contre les recommandations de tous, un fils sort sa mère atteinte d'Alzheimer de sa maison médicalisée pour la ramener chez elle. Au contact de la nature, elle revient à la vie…
Le 122, 122 rue de la Chalouère, Angers
Prix libre
Commentaires
Textes de Philippe Parrain
Cinélégende a dévidé, tout au long de ce cycle, le fil de la vie avec ses grandes étapes. Un fil qui ne cesse de se tendre, jusqu'à l'invitable rupture.
Car il faut bien conclure. Toute vie n'est-elle pas, dès le premier souffle, un long voyage vers la mort ? Mais il est toujours possible de partir à l'aventure : il reste à vivre de bons moments, de joie et d'amour, émaillés de rêves et de souvenirs provenant du long chemin parcouru. Il est encore temps de prendre la route …
L'Echappée belle
La bella Vita, Tutta la Vita davanti, La prima Cosa bella, … les premiers films réalisés par Paolo Virzi semblaient promettre un avenir radieux. Il venait de nous entraîner, avec les deux héroïnes de Folles de joie, dans une folle équipée à travers la Toscane. C'est alors que ce cinéaste typiquement italien fait une fugue et emmène sa caméra et une bonne partie de son équipe aux États-Unis, ce qui ne l'empêche pas de vouloir préserver sa vision européenne dans un contexte de production américain.
Le rêve américain, donc ? Tourné au moment des élections qui allaient amener Donald Trump au pouvoir, le film nous montre plutôt un pays vieillissant, désabusé. C'est une Amérique qu'ils ne reconnaissent plus et qu'ils semblent vouloir fuir à tout jamais qu'Ella et John traversent.
Alors qu'ils sont sur le point d'être mis à l'écart de la société, cette virée crépusculaire les expose à tous les aléas d'une vie qui s'en va tout doucement : les moments de sérénité et les petits soucis, les joies de l'amour et les inévitables conflits. On assiste aux péripéties de ces deux vieux tourtereaux partis embrasser leur jeunesse perdue.
Le film est porté par deux comédiens en état de grâce dans ce trésor de tendresse et d'humanité.
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thèmes mytho-légendaires du film
Les premières images montrent une route qui file en gros plan. Une Ford Ranger glisse tranquillement entre les alignements de maisons spacieuses, paisibles, bien rangées derrière leurs pelouses bien entretenues : l'environnement typique d'une petite ville américaine, un havre de paix dédié à la famille. Un lieu où, franchie la porte, on appelle logiquement la Mère. Mais celle-ci ne répond pas et la maison se trouve soudain vidée de son sens. Le père lui aussi est absent. Ils ont disparu, se sont volatilisés sans laisser aucune trace ni signe d'attachement. Le lit conjugal lui-même, avec ses draps défaits, semble abandonné. Une parfaite disparition assimilable à la mort, comme si ces âmes s'étaient envolées vers l'autre monde en quête d'un ultime apaisement.
Prendre le large
On va faire un petit voyage. On reviendra bientôt.
Ella à sa fille
Ella est condamnée par la maladie, John se trouve dans l'incapacité de gérer seul son quotidien. Les perspectives d'avenir se limitent pour eux à l'enfermement, à la soumission à des soins intensifs et à l'oubli, en attendant l'issue fatale. Et, le pire de tout, ils se retrouveront séparés l'un de l'autre. Alors ils fuient ce sombre avenir et s'arrachent à leur carcan familial. Laissant la banalité de leur vie derrière eux, ils décident de s'offrir de grandes vacances. Tandis que leurs enfants, ancrés dans la vie réelle, cherchent à les traquer en se préoccupant de leur sécurité, de leur compte en banque, de l'état du camping-car… tout en cassant tranquillement la croûte.
Déjà les héroïnes de Folles de joie, le film précédent de Paolo Virzi, s'étaient évadées de leur clinique psychiatrique et avaient pris la route : l'irrésistible attrait pour un au-delà. Les road-movies nous entraînent toujours dans un Autre Monde où tout devient possible. Mais, tandis que ces "belles échappées" devaient à la fin regagner le monde réel, les contraintes et le refuge de l'internement,
Ella et John glissent définitivement vers l'au-delà, là où leurs enfants ne pourront pas les joindre. Comme s'ils étaient déjà morts au moment de leur départ. Ne commencent-ils pas d'ailleurs par manger, en attendant le hamburger convoité, une barre de nougat (périmée) qu'ils réclament au pompiste syrien, sorte de gardien aux portes des Enfers ? On sait le sort qui, en mythologie, attend ceux qui, ayant franchi le seuil, consomment la nourriture des morts. Ils leur devient impossible de faire marche arrière et de revenir parmi les vivants. Perséphone en fit l'expérience, lorsque, enlevée par Hadès, elle avala, consciemment ou non, un pépin de grenade. Ce n'est que, touché par la détresse de Déméter, sa mère, qu'exceptionnellement Zeus lui permit de pouvoir quitter une partie de l'année le ténébreux royaume d'Hadès, son nouvel époux, pour revenir sur Terre auprès de sa mère.
L'île du bout du monde
Les Îles des Bienheureux, aux bords des tourbillons profonds de l'océan.
Hésiode, Les travaux et les jours
Les Enfers se trouvaient bien entendu dans les profondeurs de la terre, mais les Grecs les localisaient, du moins leur accès, à l'Ouest du monde. Leur entrée, dans l'Iliade, se trouve à l'extrême occident, au-delà du fleuve Océan. C'est également à la limite occidentale du monde habité, au large dans l'océan Atlantique, que se trouvaient les Îles des Bienheureux où les âmes vertueuses goûtaient un repos parfait après leur mort. Les Celtes plaçaient aussi leur paradis dans des îles, à l'ouest, telle l'Île aux Pommes où Morgane accueille et soigne le roi Arthur après la désastreuse bataille de Camlann.
Photogrammes de Dead Man de Jim Jarmusch (1995) |
Les héros du roman The Leisure-seeker de Michael Zadoorian dont le film est adapté, allaient bien vers l'ouest en suivant la mythique Route 66 qui les emmenait de Chicago à Los Angeles. Paolo Virzi a choisi de leur faire suivre un autre trajet en leur faisant emprunter la Route 1 qui, depuis la frontière canadienne, descend jusqu'à l'extrême-sud de la Floride. Le symbole n'est pas perdu pour autant, puisque leur ultime destination est Key West sur l'île la plus occidentale de l'archipel des Keys. C'est ainsi que, sans avoir besoin de prendre la mer, ils doivent franchir tout une série de ponts vertigineux qui jalonnent leur odyssée et en font une véritable traversée vers un ailleurs.
En sursis
C'est moi qu'on nomme l'Ankou. […] J'ai voulu te donner une preuve d'amitié, en te prévenant qu'il ne te reste pas plus de huit jours pour mettre tes affaires en règle. Dans huit jours, je repasserai ici en voiture, et que tu sois prêt ou non, j'ai mission de t'emmener.
Anatole Le Braz, Magies de la Bretagne
Il semble qu'il soit parfois possible de bénéficier d'un petit délai, si minime soit-il, de la part de la Mort, voire de pouvoir négocier avec elle comme le fait le chevalier du Septième Sceau, qui engage contre elle une partie d'échecs, ou comme Don Juan conviant à sa table la statue du Commandeur.
À l'exemple d'Ulysse qui méprise l'offre d'immortalité que lui fait Calypso et qui choisit de reprendre la mer, Ella et son mari renoncent à se faire soigner en perdant leur liberté d'aller et venir. Ils fuient l'univers sécuritaire, mais suffocant, des médecins et de leur famille, et ils reprennent goût à la vie. Ils s'en vont, un peu sur les traces de ce grand voyageur que fut Hemingway et que John vénère : la poursuite d'un rêve qui devait, lui aussi, le mener vers la mort au terme d'une vie active et créative. Mais il leur reste de beaux jours à vivre, en se soumettant aux dégradations liées à leur avancée en âge : médicaments à prendre, malaises, douleurs, confusion mentale, pertes de mémoire, incontinence... Et surtout en oubliant pour un temps le mal qui les condamne, elle le cancer généralisé, et lui la maladie d'Alzheimer.
Ils redécouvrent leur propre pays : Ella prend soin de préciser leurs origines au pompiste syrien. Venant d'un état de la Nouvelle Angleterre, finalement "so british", ils se retrouvent mal adaptés à la nouvelle Amérique. Et il suffit d'un pneu crevé pour que tout bascule, révélant le sordide et la violence. Ella est obligée de sortir le fusil… Comme elle le dit au téléphone : "Si tu pouvais voir la beauté de cet endroit...", alors qu'ils se trouvent au milieu d'une casse automobile.
Tout dérape : alors qu'il a toujours voté démocrate, John en arrive à se mêler à un meeting Make America Great Again, et il se met même à confondre Ella avec leur voisine Lillian, avant de faire une crise de jalousie vis-à-vis d'un pauvre invalide qui ne se rappelle même pas d'avoir connu Ella. Ils tombent à terre et sont incapables de s'aider l'un l'autre… Ils connaissent un pauvre moment de bonheur retrouvé lorsqu'il peuvent "dormir dans un vrai lit", mais cela se conclut par un vomissement. Les soupçons, les conflits, le mal sous-jacent remontent régulièrement à la surface, jusqu'à ce qu'Ella se trouve mal dans la maison d'Hemingway et doive être hospitalisée. Mais elle a finalement accompli sa mission.
L'Amérique que décrit le film semble elle-même sur le point de sombrer : le tournage s'est déroulé en 2016 durant la campagne présidentielle de Trump. Le réalisateur y a été sensible : "Ce climat allait marquer le parcours de nos deux personnages qui, d'ailleurs, traversent une Amérique qu'ils ne reconnaissent plus et qu'ils semblent vouloir fuir à tout jamais."
Il n'en reste pas moins que titre original du film et du livre, The Leisure Seeker ( "Le Cherche-bonheur"), suggère une quête de paradis.
À la poursuite des jours enfuis
La liberté est un autre mot pour dire qu'il ne nous reste plus rien à perdre.
Janis Joplin, Moi et Bobby McGee , chantée par John et Ella, et reprise en générique de fin
Je suis si heureuse quand tu me reviens.
Ella à John
Il s'agit d'un pèlerinage. C'est d'une vieille promesse, jamais tenue, à son mari dont Ella veut s'acquitter : visiter la maison d'Hemingway en Floride. Comme ces lieux saints - la Mecque pour les musulmans, la Kumbh Mela pour les hindous ou le Tro Breiz pour les Bretons - où le fidèle doit se rendre avant de mourir. Cela consiste pour eux à reprendre la route de leur vie : une plongée labyrinthique dans le monde des souvenirs, les bons et les moins bons, avec toutes les résurgences qu'ils peuvent susciter : les moments heureux, les moments douloureux, les tendres épanchements et les conflits latents... Ils s'arrachent au cours du temps pour ressusciter leur passé : retrouver les lieux, les gestes, les sentiments et les émotions. Au point pour John de connaître un moment de désarroi lorsqu'Ella lui annonce que leurs enfants, dont ils regardent les vieilles diapos, sont désormais adultes.
Pas besoin d'avoir recours à des flash-back. Les fantômes du passé reviennent, évoqués par les flottements de la mémoire et par ces photos de bébés ou de jeunes gens, vestiges d'un temps révolu qui continue de les hanter. Comme l'apparition de ce spectre pitoyable de Dan, le très ancien amant de sa femme, qui obsède John et qu'il entreprend de conjurer, armé d'un fusil déchargé.
Alors que des serveuses confidentes, fées bienveillantes qui croisent leur chemin, les écoutent épancher leur âme, ce voyage intérieur en finit par représenter pour John et Ella une purification à travers les épreuves successives de leur parcours. Il lave leur passé et ouvre sur le pardon. Ils auront ainsi pu vivre intensément se faire interpeler par un policier et agresser par des malfrats, ou attaquer une maison de retraite… Ella reconnaît qu'ils n'avaient jamais eu autant d'aventures auparavant, tandis que John estime qu'elles sont excellentes "pour ouvrir des horizons, ouvrir son esprit".
La force de l'amour
Je suis si content de reprendre la route.
John à Ella
Par-delà les soupçons qui surgissent, malgré les stigmates de la vieillesse, Ella et John se comportent comme un jeune couple énamouré. Comme tant d'autres héros, ils incarnent le mythe de l'amour éternel. Orphée, lui aussi un grand itinérant qui charmait avec la lyre ceux dont ils croisait le chemin, avait entrepris un long périple au-delà du monde, à la recherche de l'autre, de l'être aimé. Leur cheminement dans le film est tout autant une mise à l'épreuve de leur amour, mais ils se retrouvent à la fin, s'aiment et se perdent à jamais, unis au royaume des morts. Tels Tristan et Iseut, ils se rejoignent sur le rivage: "Corps contre corps, bouche contre bouche, elle rend ainsi son âme; elle mourut près de lui pour la douleur de son ami."
Le terme du voyage
Ils rejoignent le camping-car garé au bord d'une plage de Key West et sont heureux…
Wikipédia sur L'Échappée belle
Quand nous mourons, c'est la fin de notre être. C'est tout. Il n'y a rien de plus.
John à la serveuse du resto grill
Contrairement à l'âpreté de Dead Man, L'Échappée belle suggère un glissement en douceur vers l'au-delà, évoqué par les images récurrentes de ce gros camping-car progressant imperturbablement jusqu'au bout de cette route 1.
Tout au long du trajet, Ella et John goûtent à la vie, mais ils restent préoccupés par l'idée de la mort. Ils songent aux disparus. John demande à sa femme de lui donner le fusil le jour où son état empirera, tandis qu'Ella évoque ses parents décédés : "Je me demande comment c'est là-haut., Est-ce un endroit joyeux où on chante et danse en tourbillonnant toute la journée ?"
Ils vont jusqu'au terme du voyage, malgré les maux qui les rongent, à l'exemple du vieil homme d'Hemingway : "Il est vaincu, mais il n'est pas détruit." Mais il n'est pas question pour eux d'aller plus loin, de se laisser décrépir. Comme le chantait Jacques Brel, qui se savait alors atteint du cancer et dont les jours étaient comptés : "Mourir, la belle affaire. Mais vieillir, oh, oh, vieillir !" Ils se trouvent au crépuscule de leur vie, et leurs petites vacances se terminent : "On a besoin de faire un bon somme."
Ce qui, au début, n'était qu'un vague soupçon de pet va, une fois qu'Ella aura retiré la bâche qui empêchait les gaz d'"échappement" (justement) de pénétrer le véhicule, leur permet de franchir la dernière étape. C'est donc bien leur camping-car, l'Échappée belle (le Leisure Seeker), qui les conduira de l'autre côté de l'horizon.
Ils meurent au bord de la mer. Un pont barre l'horizon, leur promettant sans doute de s'échapper encore plus loin, bien au-delà. Tandis que l'on garde d'Ella et John l'image d'un couple apaisé, regardant vers le large.
les faux pas
Géras (Senectus pour les Latins) personnifiait la vieillesse. Il était le fils de Nyx (la Nuit) et d'Érèbe (les ténébreux Enfers). On l'a représenté comme un vieillard chétif, au sexe long et flasque, appuyé sur une canne, qu'aurait combattu Héraclès. Beaucoup le redoutaient, mais d'autres l'associaient à la sagesse. C'est également à la sagesse que nombre de sociétés associent la vieillesse, au respect des traditions et à la transmission des savoirs, ou à la cohésion, au bonheur et à la prospérité de la communauté.
Pourquoi la vieillesse ?
L'homme est devenu comme l'un de nous […] Empêchons-le […] de prendre de l'arbre de vie, d'en manger, et de vivre éternellement.
Genèse , III, 22
Photogramme des Vieux de la vieille de Gilles Grangier (1960) |
Quelle vieillesse ?
Vieillir, je n'ai rien contre, c'est le seul moyen qu'on ait trouvé pour ne pas mourir jeune.
Woody Allen
Une vieillesse immortelle, sort plus sinistre que la terrible mort.
Mimnerme, poète grec (VIIe siècle av. J.C.)
Le Grand Lama dans Horizons perdus de Frank Capra (1937) |
Le vieillard peut aussi se mettre en marge de la société, comme Diogène, être lubrique, comme ceux-là qui reluquaient Suzanne au bain, ou se montrer fourbe comme les marâtres des contes de fées. Faut-il voir la vieillesse comme une dégénérescence ou un accomplissement ? Il y a aussi le cas de Benjamin Button qui naît vieux et ne cesse de rajeunir, ou celui de Dorian Gray, ou du moins de son portrait qui vieillit à sa place. On parle aussi du beau Tithon dont la déesse Éos était tellement amoureuse qu'elle avait demandé à Zeus de lui accorder l'immortalité. Hélas elle avait oublié d'y ajouter la jeunesse perpétuelle, si bien qu'il se mit à vieillir sans cesse, à se ratatiner et à devenir gâteux, au point que son épouse dut l'enfermer dans une cage à cigale.
L'ars moriendi
J'ai besoin de bien vivre afin de bien mourir.
Tchouang-Tseu
Atropos, détail des Trois Parques de Bernardo Strozzi |
Il n'en reste pas moins que la mort vient chercher les vivants pour les entraîner dans sa macabre danse. Elle peut frapper brutalement, venir tout doucement sans être sollicitée, ou bien mettre fin à une longue période de souffrance. Certains choisissent d'abréger leur vie On peut aussi aider le moribond à partir, comme le faisaient, dit-on, les Bretons en lui frappant la tête avec le mell beniguet, le maillet bénit. Ou bien au Japon, accompagner les vieux sur la "montagne de la mort", comme le montre le film de Imamura, La balade de Narayama. Et pourquoi pas mourir béatement, tel le vieillard de Soleil vert… ?
LIVRES
. Gilles BERRUT, Vieillir dans la dignité, Cerf, 2022. Bruno PINEL, Vieillir - du mythe à la réalité , L'Harmattan, 2007
FILMS
. Oliver HERMANUS, Vivre, 2022. Akira KUROSAWA, Ikiru, 1952
. Clint EASTWOOD, Gran Torino, 2008
. David LYNCH, Une Histoire vraie, 1999
. Alexander PAYNE, Nebraska, 2013
. Robert KRAMER, Route One USA, 1989
. David FINCHER, L'étrange histoire de Benjamin Button, 2008
. Richard FLEISCHER, Soleil vert , 1973